Le régime spécifique para-hôtelier

Le loueur en meublé professionnel (LMP) bénéficie de certains avantages fiscaux notamment en matière d’imposition des plus-values et d’Impôt de Solidarité sur la Fortune. Il n’est cependant pas si facile de se voir appliquer ce statut car 3 conditions doivent être simultanément remplies :

  • les recettes annuelles provenant de cette activité par l’ensemble des membres du foyer fiscal excèdent 23 000 €
  • les recettes excèdent les revenus du foyer fiscal soumis à l’impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires au sens de l’article 79 du CGI (y compris les pensions et rentes viagères ainsi que les revenus des gérants et associés mentionnés à l’article 62 du CGI), des bénéfices industriels et commerciaux autres que ceux tirés de l’activité de location meublée, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux.
  • Le caractère professionnel ou non professionnel de la location meublée s’apprécie au niveau du foyer fiscal et s’applique à l’ensemble des locations meublées du foyer fiscal.

Or, bien qu’il soit relativement facile de réaliser des revenus de plus de 23000 € TTC chaque année (surtout sur l’Île de Ré), il est moins facile, pour des personnes en activité, de remplir la condition n°2. Toute personne qui ne réunit pas simultanément ces trois conditions est automatiquement considérée comme loueur en meublé non professionnel.

C’est pourquoi, nous avions alors limité le champ de notre étude au régime fiscal des loueurs en meublé non professionnels (LMNP), régime auquel prétend la quasi majorité des clients propriétaires de Bon Séjour en France.

LE RÉGIME PARA-HÔTELIER

Nous allons voir qu’il existe une autre voie. Il s’agit d’un régime spécifique pour des loueurs en meublé qui sont à même de fournir au moins trois des quatre prestations suivantes dans le cadre de leur activité locative :

  • la fourniture du petit-déjeuner,
  • le nettoyage régulier des locaux,
  • la fourniture de linge de maison,
  • la réception, même non-personnalisée, de la clientèle.

Si le loueur fournit au moins trois de ces quatre prestations, il perd la qualité de loueur en meublé et devient exploitant para-hôtelier, ce qui entraîne un changement de régime fiscal. L’exploitant para-hôtelier est assujetti à la TVA sur les recettes de ses locations meublées et des services complémentaires fournis, et peut prétendre à la récupération de la TVA sur ses charges et sur le prix de construction de l’immeuble affecté à l’activité ou le prix des travaux de rénovation par exemple.

Par ailleurs, si certaines conditions sont remplies, il peut imputer des éventuels déficits de son activité para-hôtelière sur ses revenus relevant d’autres catégories d’impôt sur le revenu (salaires, revenus de capitaux mobiliers…).
Ce régime est indépendant du régime du loueur en meublé professionnel ou non professionnel. En effet, c’est la nature para-hôtelière des prestations offertes dans le cadre de la location qui caractérise l’activité fiscalement et non la simple mise en location du bien meublé.

Ce régime spécifique ne relève donc ni du régime LMP, ni du régime LMNP.

QU’EST-CE QU’UN « EXPLOITANT » PARA-HÔTELIER

Selon l’administration fiscale, l’exploitant est celui qui assume personnellement les risques et qui est responsable vis-à-vis des clients, ce qui implique qu’il agisse en son nom propre à leur égard. Le recours à un intermédiaire agissant au nom et pour le compte de l’exploitant à l’égard des clients (mandataire), ne fait pas perdre la qualité d’exploitant, sauf si ce mandataire assume en fait les risques de l’exploitation ou agit en son nom propre à l’égard de la clientèle. En revanche, un mandat de type sous-location qui consisterait pour un mandataire à louer un logement meublé afin de le relouer à des locataires saisonniers ferait perdre au mandataire le statut para-hôtelier.

LES PRESTATIONS PARA-HÔTELIÈRES

Les quatre prestations qui caractérisent l’activité para-hôtelière ont appelé un certain nombre de précisions de la part de l’administration fiscale. Elles doivent s’approcher le plus possible des prestations que l’on trouve généralement quand on séjourne dans un hôtel.

Ainsi, en ce qui concerne la fourniture du petit déjeuner, l’exploitant doit disposer des moyens nécessaires pour être en mesure, si besoin, de fournir le petit déjeuner à l’ensemble des locataires selon les usages professionnels. Il est peu probable que vous soyez en mesure de fournir le petit déjeuner tous les matins à vos locataires rétais. Il faudrait donc vous concentrer sur la fourniture des trois autres prestations afin d’être qualifié d’exploitant para-hôtelier.

Vous devez nettoyer, ou faire nettoyer, votre logement locatif de manière régulière pendant le séjour de vos locataires. Cette condition est remplie si, bien que vous ne fournissiez pas effectivement un service régulier de nettoyage, vous disposez des moyens vous permettant de proposer ce service pendant le séjour de vos clients selon une périodicité régulière. Le simple nettoyage en début et fin de séjour ne suffisent pas.

Vous devez disposer de moyens nécessaires pour être en mesure de fournir, pendant le séjour, le linge de maison à tous vos locataires.

Enfin, vous devez disposer des moyens nécessaires pour être en mesure de proposer un service de réception de vos locataires.

Ces prestations para-hôtelières peuvent être réalisées soit par vous-même soit par un tiers.

Si vous faites appel à un intermédiaire pour louer votre bien et/ou fournir des prestations para-hôtelières, il est donc essentiel de bien définir dans un contrat (mandat) les responsabilités et les missions de chacun et d’utiliser les termes qui conviennent afin de lever toutes ambiguïtés et d’éviter tout risque de requalification par l’administration fiscale.

L’arrêt rendu par la Cour d’Appel de MARSEILLE le 28 janvier 2016 est intéressant à cet égard.

Il stipule que “les critères définis par la loi n’exigent pas que ces prestations parahôtelières soient matériellement effectuées mais seulement que la société dispose des moyens nécessaires pour répondre aux éventuelles demandes de ses clients“.

Concernant le nettoyage des locaux qui doit être effectué de manière régulière : “cette condition sera considérée comme établie lorsque, bien que ne fournissant pas effectivement un service régulier de nettoyage, l’exploitant dispose des moyens lui permettant de proposer un tel service au client durant son séjour, selon une périodicité régulière. En revanche, elle devra être considérée comme non satisfaite si l’exploitant se contente d’un nettoyage au début et en fin de séjour. / c – l’exploitant dispose des moyens nécessaires pour être en mesure de fournir pendant le séjour le linge de maison à l’ensemble des locataires. / d – l’exploitant dispose durant la période de location des moyens nécessaires pour être en mesure de proposer un service de réception même non personnalisé de la clientèle. Cet accueil peut être confié à un mandataire qui l’assure en un lieu unique différent du local loué lui-même. / Exemple : Un mandataire assure un service d’accueil situé à l’entrée d’un village, d’un local meublé situé dans ce village.

Caractéristiques en matière de TVA

Ce régime est surtout intéressant si vous construisez un bien destiné à la location, ou si vous entreprenez des travaux importants dans un bâtiment existant. Dans ce cas, vous pouvez recevoir un remboursement de la totalité de la TVA sur les travaux au fur à mesure de l’avancement des travaux à condition de louer votre bien pendant un minimum de X années. Ceci représente un avantage incontestable en matière de trésorerie. Par ailleurs, si vous continuez l’activité au-delà des 20 ans, la TVA remboursée est acquise.

Chaque année, vous devez verser la TVA sur les recettes de vos locations (10% en 2020) et des prestations complémentaires fournies et vous pouvez imputer sur cette TVA, la TVA que vous supportez vous-même sur les biens et services que vous supportez pour entretenir votre location meublée. Si vous décidez de ne pas recevoir un chèque de remboursement de TVA au moment des travaux, vous pouvez imputer cette TVA supportée au fur et à mesure de vos locations et prestations complémentaires chaque année.

Pour récupérer la TVA, vous devez vous placer sous le régime de la TVA au moment de l’achat ou construction de votre bien – adressez-vous à un expert-comptable qui saura vous guider dans les formalités et s’occuper de vos obligations déclaratives par la suite. Il n’y a plus l’obligation d’être inscrit auprès du registre des commerces et des sociétés pour être placé sous ce régime en tant qu’exploitant para-hôtelier.

CARACTÉRISTIQUES EN MATIÈRE D’IMPÔT SUR LE REVENU

L’activité para-hôtelière, tout comme la location meublée, relève des règles des bénéfices industriels et commerciaux (BIC). Afin d’imputer les éventuels déficits de votre activité para-hôtelière sur les autres revenus de votre foyer fiscal, il faut que l’activité soit considérée comme « professionnelle », c’est-à-dire qu’elle soit caractérisée par la participation personnelle, directe et continue de l’un des membres du foyer fiscal à l’accomplissement des actes nécessaires à l’activité. Si vous faites appel à un tiers pour réaliser l’activité sans intervenir vous-même de manière significative, vous ne pouvez avoir la qualité de professionnel. L’article 156-I 1bis stipule notamment qu’ «Il en est ainsi, notamment, lorsque la gestion de l’activité est confiée en droit ou en fait à une personne qui n’est pas un membre du foyer fiscal par l’effet d’un mandat, d’un contrat de travail ou de toute autre convention ».

Comme vous pouvez le constater, les critères d’assujettissement à la TVA et ceux gouvernant la déduction des déficits ne sont pas tout à fait les mêmes. Pour déduire un déficit, il convient de participer activement et significativement à l’activité para-hôtelière. Dans sa documentation, l’administration fiscale parle d’un « faisceau d’indices » et invite les services fiscaux à apprécier chaque situation selon ces indices. Elle prévoit que « la participation à l’activité doit résulter de l’accomplissement d’un ensemble d’actes constitutifs d’une des fonctions nécessaires à l’entreprise et non d’actes isolés, même si ces derniers sont en eux-mêmes nécessaires à l’activité (signature des déclarations fiscales par exemple). »

Il vous faut donc passer du temps à gérer vous-même votre activité même si vous ne réalisez pas vous-même chaque prestation para-hôtelière, ce qui peut être compliqué à mettre en place si vous n’habitez pas sur place et que vous confiez la gestion du bien à un tiers…

CONCLUSION

L’application du régime para-hôtelier répond à des règles relativement complexes et n’apporte des avantages que dans certaines situations bien précises (par exemple achat neuf, construction, travaux importants). Pour mettre en œuvre ce régime, nous vous conseillons de faire appel à un expert-comptable ou à un avocat spécialisé afin de mettre en place le cadre juridique qui répond parfaitement à la règlementation.

Enfin, si on parle ici de fiscalité, il est important de rappeler la règle d’or qui est toujours la même en matière d’investissement immobilier et que tous les conseillers en gestion de patrimoine dignes de ce nom répètent sans cesse : l’avantage fiscal attaché à tel ou tel investissement ne doit pas être le seul et l’unique déclencheur. L’optimisation fiscale ne doit être que la cerise sur le gâteau ! Si vous ne suivez pas ce principe, vous risquez de vivre de graves déconvenues lors de la revente (en enregistrant une moins-value) ou en cas de changement de règles fiscales. Et ce côté-là le risque est grand, tant la France est championne du monde en matière d’instabilité fiscale !!